09/10/2013

Franc-maçon et citoyen

 

Selon le Petit Robert, le citoyen est la personne qui appartient à une cité, en reconnaît la juridiction, est habilité à jouir, sur son territoire du droit de cité et est astreint aux devoirs correspondants.Parmi les droits du citoyen se trouve celui de s’occuper des affaires de la cité et donc de faire de la politique au sens noble du terme.L’appartenance à la Franc-maçonnerie est-elle compatible avec les devoirs d’un bon citoyen ?

 L’anathème jeté sur la Franc-maçonnerie l’a accusée de comploter contre l’Etat et la Nation. Ce complot maçonnique est-il réel ?En face du problème politique et du choix politique quelle peut-être l’attitude d’une institution comme la Franc-maçonnerie ? Le franc Maçon est-il libre dans son choix politique ?Ce sont les deux questions auxquelles nous allons essayer de répondre.

 A/ LE COMPLOT MACONNIQUE CONTRE L’ETAT ET LA NATION N’EXISTE PAS.

Dans chacun des pays où les Maçons ont le droit de se réunir pour cultiver leur idéal de concorde et d’harmonie sociale, la franc Maçonnerie par loyauté prescrit à ses adeptes , l’obéissance aux lois de ce pays et les sacrifices nécessaires à sa défense , quels qu’en soient le régime politique et le Gouvernement.L’article 2 des constitutions d’Anderson dispose : « un Maçon est un paisible sujet à l’égard des pouvoirs civils, en quelque lieu qu’il réside ou qu’il travaille, et ne doit jamais être mêlé aux complots et conspirations contre la paix et le bien être de la nation, ni manquer à ses devoirs envers les magistrats inférieurs; car la Maçonnerie a toujours pâti de la guerre, de l’effusion de sang et du désordre. »

 Les constitutions de la Grande Loge de France Obédience de la Maçonnerie spiritualiste comme la Grande Loge Unie du Cameroun nous rappellent que « Les Francs Maçons doivent respecter les lois et l’autorité légitime du pays dans lequel ils vivent et se réunissent librement. Ils sont des citoyens éclairés et disciplinés et conforment leur existence aux impératifs de leur conscience. »

Le franc-maçon se doit par conséquent d’obéïr aux lois de la cité. Son obéissance ne sera pas celle d’un robot car le concept de citoyenneté comporte une ambivalente balance qui est entre l’appartenance à une collectivité régie par des lois et le souci d’un certain respect de l’individu.Comme le dit le philosophe Alain « Résistance et obéissance sont les deux vertus du citoyen. Par l’obéissance il assure l’ordre par la résistance il assure la liberté ».Le poète Paul Géraldy renchérit en disant : «  si l’Etat est fort, il nous écrase  s’il est faible nous périssons ».Au Franc-maçon de trouver la juste mesure dans l’exécution de son devoir d’obéissance et dans celle de son devoir de résistance.La Franc-maçonnerie en tant qu’institution ne complote par conséquent pas contre l’Etat et la Nation.Mais la Franc-maçonnerie dicterait-elle à ses adeptes un choix politique quelconque ?

 B/ LA FRANC MACONNERIE FACE AU CHOIX POLITIQUE

En face du problème politique et du choix politique quelle est et quelle peut être l’attitude de la Franc- maçonnerie, et en particulier quelle est l’attitude de la Grande Loge Unie du Cameroun ?

Dans le point quatre de sa déclaration de principe la GRANDE LOGE UNIE DU CAMEROUN proclame «  qu’elle ne s’immisce, de même que ses Loges, dans aucune controverse touchant à des questions politiques ou confessionnelles. Pour l’instruction des frères, des exposés sur ces questions suivis d’échanges de vue sont autorisés. Toutefois les débats sur ces sujets ne doivent jamais donner lieu à un vote ni à l’adoption des résolutions lesquelles seraient susceptibles de contraindre les opinions ou les sentiments de certains frères. »

 Dans le domaine politique comme dans le domaine religieux la Franc Maçonnerie laisse à chaque Maçon la liberté de se déterminer selon sa propre conscience, en fonction de ce qu’il croit le plus utile et le plus juste dans le respect de la loi.Et pas plus que nous ne retrouverions dans ses principes des indications pour un choix religieux ou confessionnel particulier, nous ne retrouverions en elle l’indication pour un choix idéologique précis.Le débat et le choix politique concerne le citoyen franc-maçon et n’engage que lui, en toute autonomie et en toute indépendance sans aucune pression d’aucune sorte.Mais là où des systèmes ont été instaurés, qui proclament l’absolutisme d’une église ou d’un parti les Maçons ne peuvent que s’inscrire en faux contre l’oppression et la tyrannie.Pour Henri TORT-NOUGES passé Grand Maître de la grande Loge de France, « La Grande Loge de France en tant qu’institution, ne se croirait le droit d’intervenir (non seulement le droit mais le devoir) dans la vie publique que si elle se sentait menacée dans son existence, et sa vie par des entreprises subversives ou si elle croyait effectivement et justement menacées également les libertés fondamentales de l’homme(les droit souverains de la personne humaine). »La franc Maçonnerie de tradition observe scrupuleusement le principe de la neutralité politique et religieuse.Il ne resterait rien de l’idée de centre de l’union si la Franc-maçonnerie s’égarait dans des prises de positions qui mettraient l’Ordre Maçonnique derrière telle ou telle option politique et religieuse.C’est pourquoi au sein de nos Loges nul ne peut être inquiété pour les options  ou les convictions qu’il professe à partir du moment où ces convictions ne visent pas à l’avilissement de l’homme ou à la réduction voire à la suppression des libertés individuelles ou publiques.La tradition à laquelle nous nous relions n’est pas un fossile témoignant d’un passé à jamais résolu, mais bien au contraire une spiritualité  vivante qui pousse le Franc Maçon, quel que soit le domaine dans lequel il agit, à remplir son devoir vis-à-vis des autres hommes.S’il n’y a pas une politique maçonnique il existe par contre une éthique qui découle de la spiritualité initiatique et que l’on peut définir en peu de mots : tout ce qui élève l’homme est nôtre. Ainsi donc le Franc Maçon ne peut travailler que dans cette direction.

 

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L’étude de ce thème nous a montré que la Franc -maçonnerie respecte la liberté de conscience et la liberté de pensée de ses adeptes ; qu’elle ne leur dicte ni ne leur impose un choix religieux ou un choix politique précis.A la fin de leurs réunions le Président de la Loge invite cependant ses frères Francs Maçons à poursuivre au dehors l’œuvre commencée dans le Temple.A l’intérieur du Temple le Franc Maçon apprend à se bâtir. Sorti du Temple il doit œuvrer pour bâtir la citée idéale.C’est d’abord dire que le franc Maçon se devra de rayonner dans la cité pour porter au dehors les lumières acquises à l’intérieur du Temple. Ce faisant il ne fera que répondre à cette recommandation du Maître Jésus qui disait à ses disciples : « soyez comme des villes éclairées au sommet d’une colline »La même recommandation se retrouve dans son propos lorsqu’il dit « qu’on n’allume pas un cierge pour le mettre sous le boisseau, mais on le dépose sur la table afin qu’il éclaire toute la pièce ».Le Franc Maçon se doit d’être un modèle dont le comportement éclairera la cité. Le Franc Maçon sera par conséquent un porteur de lumière, un porteur de vérité.Au delà du modèle qu’il doit être, le franc Maçon qui est un bâtisseur ne sera pas un citoyen passif, mais un citoyen actif, un citoyen engagé oeuvrant en architecte de la cité idéale.Cette cité idéale est une société plus humaine. Quelle sera la maquette de cette citée idéale ?En d’autres termes quelles seront les valeurs que le Franc Maçon devra promouvoir dans cette citée ?Les valeurs que le franc Maçon portera hors du Temple sont les valeurs de Liberté, d’Egalité, de Fraternité, de Tolérance, de justice et d’amour apprises dans le Temple.Sa cité idéale sera une citée au sein de laquelle l’homme dans sa pluri-dimensionnalité trouvera son plein épanouissement. Une société qui ne cherchera pas à réduire l’homme à l’uni-dimension de sujet économique ou sujet politique. Car l’homme est sans doute citoyen et doit être citoyen, mais il n’est pas que citoyen et ne saurait être que cela.Cette cité sera structurée par l’union dans la diversité, le contraire de l’unité dans la conformité, le modèle totalitaire qui entretien la barbarie pour le seul bénéfice des prédateurs. Ce sera une cité où règne la loi d’amour.Cette citée idéale d’illustres Maçons en ont posé les premières pierres ; citons pèle mêle Jules FERRY et Emile COMBES qui luttèrent pour que les enfants soient en mesure d’étudier en vue de choisir leur destin, Victor SHOELCHER (1804-1893) qui obtint l’abolition de l’esclavage des Noirs, GARIBALDI qui combatit pour l’unité de l’Italie, Léon BOURGEOIS (1851-1925) qui donna l’appellation SDN , Société Des Nations, à l’ organisation internationale devenue ONU qu’il présida en 1919, Francisco FERRER qui fonda à Barcelone en Espagne « l’Ecole Moderne » qui prodiguait gratuitement un enseignement de qualité affranchi de l’emprise de l’Eglise.Vaste est le chantier; surtout dans nos pays sous-développés d’Afrique où tout reste à faire. Nos devanciers ont eu le rêve et l’audace de poser les premières pierres de cet édifice.

A nous d’en poursuivre la construction. Oui nous le pouvons !

(par un TIF 33)

03/10/2013

Franc-maçon et croyant, bien possible

 

La Franc Maçonnerie se définit elle-même comme « une alliance universelle d’hommes et de femmes libres et de bonnes mœurs, ayant reçu la lumière, unis pour travailler au perfectionnement  intellectuel, moral et spirituel de l’humanité.»

 

L’idée précise de ce qu’elle est figure dans la déclaration de principe du convent de Lausanne de 1875. Le convent de Lausanne est une assemblée de puissances maçonniques souveraines qui siégea à la ville de Lausanne, en Suisse, en 1875.A l’issue de ses travaux cette assemblée rédigea une déclaration de principe libellée ainsi qu’il suit :

« La franc maçonnerie proclame, comme elle a proclamé dès son origine, l’existence d’un principe créateur sous le nom de grand architecte de l’univers.

 

Elle n’impose aucune limite à la recherche de la vérité et c’est pour garantir à tous cette liberté qu’elle exige de tous la tolérance.

 

La franc- maçonnerie est donc ouverte aux hommes de toute nationalité, de toute race, de toute croyance.

 

Elle interdit dans ses ateliers toute discussion politique et religieuse ; elle accueille tout profane quelles que soient ses opinions en politique et en religion dont elle n’a pas à se préoccuper, pourvu qu’il soit libre et de bonnes mœurs.

 

La franc maçonnerie a pour but de lutter contre l’ignorance sous toutes ses formes, c’est une école mutuelle dont le programme se résume ainsi : obéir aux lois de son pays, vivre selon l’honneur, pratiquer la justice, aimer son semblable, travailler sans relâche au bonheur de l’humanité et poursuivre son émancipation progressive et pacifique. »

 

Cette déclaration de principe qui parle des buts de la franc- maçonnerie demeure inconnue du grand public parce que la franc- maçonnerie ne pratique pas le prosélytisme.

 

Dans le monde profane la Franc Maçonnerie est perçue comme une société élitiste, une société misogyne, une société secrète, une secte religieuse, une société occultiste, une société qui complote contre l’Eglise et l’Etat.

 

Certains propos tenus contre la Franc Maçonnerie par les Eglises Réveillées de nos pays peuvent nous amener à sourire en nous disant que leurs propos sont dus à l’ignorance et au manque de culture de leurs adeptes.

Mais lorsque ces propos sortent de la bouche de certains membres du clergé Catholique ils suscitent chez les Francs Maçons  une envie d’éclairer les profanes sur la nature réelle de la Franc Maçonnerie.

 

En 1980 l’Abbé de Nantes dans sa revue La Contre-réforme catholique comparaît la Franc Maçonnerie à « une puissance étrangère en conspiration permanente contre l’âme et la corps de la nation, Etat dans l’Etat cherchant à dominer l’Etat lui-même contre la Nation. »

 

 

Ces propos, vous l’avez deviné, sont ceux d’un prêtre intégriste catholique.

Ils peuvent prêter à sourire mais n’oublions pas que la position officielle de l’Eglise catholique a condamné, depuis la bulle papale du pape Clément 12 du 28 avril 1738,  la Franc Maçonnerie peu après sa naissance, en raison du secret qu’elle impose , des torts qu’elle peut porter à la tranquillité de l’Etat et au salut spirituel des âmes et pour, disait-il, « d’autres motifs raisonnables et justes connus de nous ».

 

Cette bulle papale n’eut aucun effet en Angleterre, la Franc Maçonnerie 

Anglo- saxonne, d’essence théïste, ayant clairement identifié le G :.A :.D :. L :.U :. au Dieu de la Bible.

 

C’est en France pays à Maçonnerie d’essence déïste que cette bulle fut appliquée, avec une certaine modération cependant, le Vatican ayant estimé que le pouvoir d’appliquer cette sanction était de la compétence de l’Evêque du diocèse auquel appartenait le fidèle fautif.

 

Il faut cependant relever qu’au 18ème siècle la Franc Maçonnerie comptait en son sein plus de 2000 membres du clergé catholique.

 

L’on ne peut pas dire que la Franc Maçonnerie soit en odeur de sainteté dans les pays musulmans. La Franc Maçonnerie a en effet du mal à se développer dans ces pays.

 

En prenant en exemple les pays musulmans d’Afrique du Nord je ne peux citer que le Maroc comme pays dans lequel travaillent des obédiences maçonniques dans des conditions acceptables.

 

Dans un pays d’Afrique noire à dominance musulmane on a récemment vu, un homme politique important, dont un journal disait qu’il avait reçu l’initiation maçonnique, nier son appartenance à la Franc Maçonnerie pour ne pas vexer son électorat composé d’importantes sectes musulmanes.

 

Vous le voyez ! la Franc Maçonnerie n’est pas bien vue de certaines religions mais qu’en est-il de ses relations avec les Etats contre lesquels elle comploterait ?

 

La Franc Maçonnerie a eu maille à partir avec les régimes totalitaires. Elle a énormément été persécutée dans les pays d’Europe sous occupation Nazie.

 

Elle a pratiquement été interdite dans les pays communistes de l’ancienne Europe de l’Est.

 

Elle n’a survécu à Cuba que grâce au Lider Massimo Fidel CASTRO qui avait été fasciné par un de ses camarades de lutte Franc Maçon dont il admirait l’éthique.

 

La Franc Maçonnerie est mal perçue par les régimes totalitaires parce qu’elle prône la liberté et la tolérance.

 

Le Franc Maçon est un homme libre et de bonne mœurs ;

 

Sa liberté l’empêcherait-t-il d’être croyant ? Sa liberté l’empêcherait-t-il d’être un bon citoyen ?

 

En d’autres termes peut-on être Franc Maçon et croyant ?

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I-                  PEUT-ON ETRE FRANC MACON ET CROYANT ?

 

A cette question les Francs maçons spiritualistes que nous sommes répondent par l’affirmative.

 

La Franc-maçonnerie n’interdit  pas à ses adeptes la pratique d’une religion. Au surplus les thèses avancées au soutien de l’incompatibilité de l’état de Franc Maçon d’avec celui de croyant voire de chrétien ne sont pas vraies.

 

 A / LA F :.M :.N’INTERDIT PAS A SES ADEPTES LA PRATIQUE D’UNE RELIGION

 

L’article 1er des constitutions d’Anderson acte de naissance de la maçonnerie spéculative moderne dispose :

 

« qu’un maçon est tenu par son obligation d’obéir à la loi morale et, s’il comprend bien l’art, ne sera jamais un athée stupide ni un libertin irréligieux.»

 

Ce texte a été introduit dans lesdites constitutions dont la paternité est attribuée aux pasteurs presbytériens ANDERSON et DESAGULIERS pour conserver à la Franc-maçonnerie son caractère sacré.

 

La Franc-maçonnerie opérative, ancêtre de la Franc Maçonnerie spéculative, était une confrérie catholique constructrice d’édifices sacrés.

 

L’article 7 des constitutions d’Anderson dispose quant à lui qu’un « maçon est obligé de par sa tenure, d’obéir à la loi morale et de suivre la religion sur laquelle tous les hommes sont d’accord. »

 

La Franc-Maçonnerie n’interdit donc pas à ses membres la pratique d’une religion.

 

Pas plus qu’elle ne leur interdit d’avoir une quelconque croyance. La Franc maçonnerie proclame, dans sa déclaration de principe que je vous ai lue en introduisant mon propos, « l’existence d’un principe créateur sous le nom de grand architecte de l’univers.»

 

C’est dire que le Franc Maçon spiritualiste laïque  croit en l’existence d’un principe créateur.

 

D’où provient donc cette incompatibilité entre l’état de croyant et celui de Franc Maçon ?

 

La Franc-maçonnerie est née et s’est développée dans les pays de culture judéo-chrétienne .Elle est née, dans sa forme moderne, en Angleterre dans un pays où la religion dominante était le protestantisme; ses constitutions sont l’œuvre de deux pasteurs presbytériens;  il n’est donc pas étonnant que les tenants de la thèse de l’incompatibilité de l’état de Franc Maçon et de croyant, de l’incompatibilité entre l’état de Franc Maçon et l’état de  Chrétien se soient manifestés au sein de l’Eglise catholique qui, à l’époque, ne tenait pas en haute estime la religion protestante

 

B/ LES THESES DE LA RELIGION CATHOLIQUE QUI PRONENT  L’INCOMPATIBILITE ENTRE L’ETAT DE F :.M :. ET L’ETAT DE CHRETIEN SONT ELLES VRAIES ?

 

Le code canonique de 1917 au canon 2335 dispose : « quiconque est franc-maçon complote contre l’église et est donc excommunié ipso-facto. »

 

Cette position de l’Eglise Catholique va évoluer ; le code canonique de 1983 dans son canon 1374  dispose que « Qui s’inscrit dans une association qui conspire contre l’Eglise sera puni d’une juste peine ; mais celui qui y joue un rôle actif ou qui la dirige sera puni d’interdit. »

 

L’Eglise Catholique dans son nouveau canon ne vise plus expressément la Franc Maçonnerie mais le 26 novembre 1983 , veille de l’application officielle dudit code, le cardinal Ratzinger, à l’époque Préfet de la Congrégation de la Doctrine de la Foi, a pris soin de faire publier un texte, complément du nouveau code de droit canonique  ayant valeur de jugement officiel, dans lequel il a déclaré : « le jugement négatif de l’Eglise sur les associations maçonniques demeure inchangé parce que leurs principes ont toujours été considérés comme inconciliables avec la doctrine de l’Eglise. Les fidèles qui appartiennent aux associations maçonniques sont en état de péché grave et ne peuvent accéder à la sainte communion »

 

Y’a-t-il vraiment incompatibilité entre la foi chrétienne et la Franc Maçonnerie ?

 

A cette question la Grande Loge Unie du Cameroun répond par la négative.

 

Après avoir examiné la nature, le contenue et la finalité de la foi chrétienne et la nature, le contenue et la finalité de la Franc-maçonnerie, après avoir comparé le crédo catholique aux  valeurs prônées par les  grandes constitutions de la Franc-maçonnerie, la Grande Loge Unie du Cameroun arrive à la conclusion qu’on ne voit rien dans les valeurs prônées par la Franc-maçonnerie qui puissent choquer une conscience chrétienne et qui puissent entrainer une excommunication.

 

L’Eglise chrétienne et la Franc-maçonnerie ne se situent pas sur le même plan et n’obéissent pas à la même finalité.

 

Le Christianisme est une religion qui veut apporter aux hommes le salut et la vie éternelle. La Franc-maçonnerie andersonnienne ne formule à ce sujet aucune indication ou contre indication. Elle se présente comme un ensemble de recettes pratiques qui concernent le Franc-maçon ici et maintenant.

 

 La religion chrétienne veut permettre à l’homme de gagner le ciel ; la Franc-maçonnerie veut seulement lui permettre d’organiser sa vie sur terre.

 

De 1974 à 1981 les Francs Maçons allemands avaient entrepris un dialogue avec l’Episcopat allemand en lui communicant l’ensemble des rituels maçonniques.

 

Après l’étude de ces rituels la Conférence des évêques d’Allemagne conclut que: « Les recherches entreprises sur les rituels francs-maçons et la spiritualité franc-maçonne font clairement apparaître qu’il est exclu que l’on puisse appartenir en même temps à l’Eglise catholique et à la franc-maçonnerie »

 

L’épiscopat allemand a formulé une quinzaine de griefs contre la franc-maçonnerie. Je vais m’attarder sur les quatre principaux griefs suivants :

 

-         la pratique du tolérantisme et du relativisme religieux.

-         La pratique du secret et de l’ésotérisme

-         La négation du crédo du fait de la soutenance du primat de la raison par rapport à toute vérité révélée

-         L’atteinte à la théologie du salut ou de la grâce

 

La pratique du tolérantisme, de l’indifférentisme et du relativisme religieux

 

Reproche est fait à la Franc-maçonnerie de compter en son sein des adeptes de confessions religieuses diverses. Reproche lui est également fait de prôner l’égalité doctrinale des religions révélées. Reproche lui est enfin fait de prôner la relativité de toute vérité et d’adhérer au concept de la religion où tous les hommes sont d’accord.

 

Avant d’apporter une réponse à ces trois griefs il convient de préciser que la Franc-maçonnerie perçue comme une rivale par l’Eglise catholique n’est pas une religion.

 

La franc maçonnerie ne peut pas être une religion ni une secte puisque cela irait à l’encontre de sa tolérance et du respect de la liberté de chacun affirmée dans la déclaration de principe du convent de Lausanne.

 

Son fonctionnement repose sur l’interdiction de contraindre qui que ce soit à partager des convictions quelconques qu’elles soient religieuses ou politiques.

 

Le tolérantisme religieux par l’acceuil au sein de la Franc Maçonnerie de membres de confessions religieuses variées.

 

En accueillant en son sein des membres de confessions religieuses variées la Franc-maçonnerie répond à sa vocation universaliste.

 

L’union fraternelle de diverses confessions n’implique de la part de la maçonnerie aucun syncrétisme théorique mais la confrontation et la collaboration spirituelle des confessions religieuses, comme le pape Jean Paul II en a suivi l’exemple en invitant de nombreuses confessions religieuses à se rencontrer à Assise le 27 octobre 1986 et à y prier ensemble pour la paix dans le monde.

 

Reproche ne peut pas être sérieusement fait à une association, dans une société laïque, d’accueillir en son sein des membres de confessions religieuses variées.

 

L’indifférentisme religieux

 

L’épiscopat allemand soutient que par son indifférentisme religieux la        Franc-maçonnerie exclut par principe toute religion révélée.

 

Cette thèse contient en principe deux thèses:

-         la Maçonnerie serait indifférentiste en matière de religion.

-         La Maçonnerie exclurait la pratique de la religion chrétienne

 

L’indifférentisme religieux professe que la présence de la même tradition universelle dans un certain nombre d’écrits transmis par des religions rend ces religions égales d’un point de vue doctrinal, égalité doctrinale qui rend nécessairement indifférent le choix de l’une ou de l’autre de ces religions.

 

Dans Nostra aetate le Concile Vatican II déclarait en 1965 au sujet des religions non chrétiennes : «  L’Eglise catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. Elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines  qui….apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes. »

 

L’étude comparée des religions a montré qu’une même symbolique cosmologique et parfois les mêmes archétypes universels traversaient différentes formes religieuses.

 

La Franc-maçonnerie spiritualiste qui intègre dans ses traditions la tradition primordiale ne peut être taxée d’indifférentisme religieux dès lors que fidèle à son absence de fonction didactique elle ne se prononce pas sur la valeur des religions.

 

Les constitutions d’Anderson édictent « qu’un maçon…s’il comprend bien l’art… ne sera jamais un libertin irréligieux. »

 

La Franc-Maçonnerie n’interdit donc pas à ses membres  la pratique de la religion chrétienne, pas plus qu’elle ne leur interdit la pratique des autres religions, attendu que son point de vue est philosophique et non théologique.

 

Le relativisme de la vérité et de la religion

 

Selon l’épiscopat allemand « la relativité de toute vérité serait la base de la franc-maçonnerie et le concept de religion où tous les hommes sont d’accord impliquerait une conception relativiste de la religion. »

 

La Franc- maçonnerie n’enseigne rien. Elle se contente de livrer, sans les interpréter, des symboles à la méditation de chacun de ses membres. En ce sens elle ne proclame aucune vérité et la vérité ne peut donc être revendiquée que par chaque Maçon pris individuellement comme sujet de son interprétation personnelle des symboles maçonniques.

 

La religion où tous les hommes sont d’accord expression empruntée des constitutions d’Anderson désigne la religion naturelle qui comprend :

 

-         d’une part la pratique spontanée de la loi morale en dehors de toute culture médiatisée  par un culte, un clergé ou des écrits, implique nécessairement l’universalité métaculturelle.

 

-         Cette éthique naturelle se trouve, d’autre part, décrite dans la Bible sous la forme du noachisme qui est la religion intérieure  et antérieure aux cultes extérieurs institués, telle que la pratiquaient les peuples de la terre avant la révélation de la Torah écrite à Moïse.

 

Le concept maçonnique et andersonnien de religion où tous les hommes sont d’accord, qui désigne la religion naturelle ou noachisme n’implique donc aucune conception relativiste de la religion.

 

 

La pratique du secret et de l’ésotérisme

 

L’Eglise catholique condamne la pratique du secret. Elle condamne l’enseignement ésotérique.

 

Dans l’Eglise catholique, soutiennent les tenants de la thèse de l’incompatibilité, il n’y a pas d’enseignement secret. La doctrine de la foi chrétienne est accessible à tous (Bibles, catéchismes, textes des conciles etc ;)

 

Le christianisme est la révélation de l’amour de Dieu manifesté en son fils Jésus- christ. Il ne voile pas, il dévoile.

 

La franc Maçonnerie serait de type gnostique et prétendrait donner à ses adeptes une formation ésotérique, enseignement secret qui révèlerait le sens caché. Ses rituels feraient miroiter aux yeux des initiés l’acquisition d’une « tradition primordiale » et d’une « lumière » qui, au mieux, serait celle de l’intelligence  mais en aucun cas celle de la transfiguration en Christ.

 

Chaque religion révélée a son côté exotérique et son côté ésotérique. Dans la religion juive, l’ésotérisme se trouve dans la kabbale; Dans la religion musulmane cet ésotérisme se rencontre dans le soufisme. La Bible elle-même dans ses deux livres, l’ancien et le nouveau testament contient des écrits dont l’interprétation littérale diffère de leur compréhension ésotérique voire métaphysique.

 

Ne perdons pas de vue que Jésus, lui-même, était de religion juive et qu’il n’est venu apporter qu’une autre compréhension de la loi. Et comme tout juif a reçu un enseignement cabalistique.

 

C’est le Rabbin Josy EISENBERG qui dans la partie judaïca de l’émission « les chemins de la foi » diffusée par France II nous apprenait qu’après la disparition de Jésus ses apôtres s’adonnèrent avec frénésie à l’étude de l’arbre de vie kabbalistique point de départ de la cabale chrétienne.

 

L’ésotérisme reproché à la Franc-maçonnerie est véhiculé par ses symboles laissés à la libre interprétation de ses adeptes.

 

Le droit d’interpréter individuellement les symboles est reconnu par Jésus lui-même lorsqu’il demande très précisément à ses disciples : « Pour vous qui suis-je. » (Mathieu 15.16)

 

La liberté d’interprétation individuelle des symboles , se trouve confirmée dans l’Ecriture par le fait que Jésus interdit à ses disciples de se fier à l’interprétation d’autrui :

 

« Alors si quelqu’un vous dit : voici : le Christ est ici ! Ou bien ici ! N’allez pas le croire. Car il se lèvera de faux Christ et de faux prophètes qui opèreront de grands signes  et prodiges, de façon à égarer si possible même les élus. Voilà : je vous ai prévenus. Si donc on vous dit : Voici : il est dans le désert ! N’y sortez pas ; le voici dans les resserres. Ne le croyez pas » (Mathieu 24,23-26 ) .

 

Jésus lui-même nous donne l’exemple de l’importance du secret et du silence sur la vérité lorsqu’il refuse de répondre à Pilate qui lui demande : « Qu’est-ce que la vérité ? »

 

L’Eglise ne peut donc pas reprocher aux obédiences maçonniques de ne pas interpréter des symboles que l’écriture elle-même recommande de garder voilés.

 

Le franc Maçon soumis à la loi du silence et du secret peut parfaitement être chrétien.

 

La négation du crédo du fait de la soutenance du primat de la raison par rapport à toute vérité révélée

 

Selon les tenants de la thèse de l’incompatibilité le Christianisme  comporte un certain nombre de dogmes qui sont autant de fenêtres ouvertes par la lumière de la foi sur le mystère de Dieu. Ces affirmations objectivent la foi du chrétien.

 

Ces affirmations constituent le Crédo et sont :

-         la foi en un dieu unique en trois personnes

-         la divinité de Jésus Christ

-         son incarnation

-         sa résurrection

-         son ascension

-         l’immaculée conception

-         etc….

 

Un catholique ne peut renier ces vérités transmises et enseignées par l’Eglise sans renier sa foi.

 

Les tenants de la thèse de l’incompatibilité pensent que le Maçon qui soutient le primat  et l’autonomie de la raison par rapport à toute vérité révélée ne peut adhérer aux dogmes constituant le crédo.

 

La Franc Maçonnerie est adogmatique dans le sens ou elle ne professe aucun dogme à ses adeptes. Elle ne porte aucun jugement sur les religions.

 

Le Franc Maçon est libre d’adhérer à la religion de son choix et si, cette religion à l’instar de la religion catholique comporte un crédo, le Maçon de confession catholique est libre d’y adhérer.

 

Les Francs Maçons de rite écossais ancien et acceptés que nous sommes savent que la Maçonnerie écossaise concilie foi et raison.

 

Il est donc inexact d’affirmer que la Franc Maçon adhère à une doctrine faisant primer la raison sur la vérité révélée.

 

L’atteinte à la théologie du salut et de la grâce

 

Les tenants de la thèse de l’incompatibilité soutiennent que la philosophie humaniste que prônerait la Franc Maçonnerie et selon laquelle, l’homme n’aurait pas besoin de salut dès lors qu’il se perfectionne sans cesse par lui-même serait contraire à la foi chrétienne.

 

Pour accéder au salut, disent-ils, un chrétien compte d’abord sur la grâce miséricordieuse de Dieu qui éclaire son intelligence, soutient son agir et attise son désir plus que sur ses propres ressources ou ses seules œuvres.

 

A contrario le Franc Maçon compterait sur son pouvoir auto-créateur et sur la force de solidarité de sa loge.

 

Il n’y a pas d’incompatibilité entre la démarche chrétienne consistant à implorer la grâce miséricordieuse de Dieu auquel il demande d’éclairer son intelligence, de soutenir son agir et d’attiser son désir pour accéder au salut et le travail que le Franc Maçon effectue sur lui-même pour s’améliorer.

 

« Or et labor », « prie et travaille » disaient les alchimistes qui espéraient, d’un point de vue spirituel, transformer l’homme vulgaire en un homme transcendant.

 

La franc Maçonnerie met un accent particulier sur le travail de l’homme sur lui-même en vue de son perfectionnement.

 

Le christ lui-même, dans les enseignements professés à ses disciples, les invitait à « être aussi parfaits que nôtre père qui est aux cieux ».

 

Ce travail qui consiste à fuir le vice et à pratiquer la vertu mène-t-il au salut au sens chrétien du terme ? je n’en sais rien. Mais la religion chrétienne comme l’ensemble des religions du livre invite ses fidèles à la pratique de la vertu.

 

La Franc Maçonnerie n’interdit pas à ses adeptes de prier le Dieu de leurs religions. Elle ne porte pas atteinte à la théologie du salut et de la grâce.

j'ai dit